Lithie par E. Poutrel d'après
une Photoie de J.Doesnard
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"Tisserande en bas,
dans la cave où la pauvreté cingle son courage, elle est poète là-haut,
dans la houle des feuilles, quand l'été roussit les chênes, parmi les
seigles qui ondulent en chantant le secret des saisons ... Dans une cave
humide, Rose tissait de la toile..."Marie de Besneray.
"C’est une fantaisie
étrange du destin,
D’avoir près d’un fuseau, mis un luth dans sa main..."
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- Je dédie ces pages et mes
recherches aux habitants de Bellou, d'hier et d'aujourd'hui, NJGJ -
"Marie, Rose, Eugénie est née le 8 avril
1826 dans une "cabane de chaume gris, la plus modeste du village".
Ainsi décrit-elle sa maison au Hameau de la Hamelinière,
à Bellou Calvados, entre forêts et pommiers, en ce beau Pays d'Auge. Au
lendemain, deux laboureurs attestent de sa naissance. Elle est "Fille
naturelle" d'Eugénie, 26 ans, fileuse, de Bellou comme l'étaient
ses aïeux... et voilà bien ce que nous savons.
Couramment nommée Eugénie, elle est
affectueusement nommée "Jenny", et ce ne sera que vers l'âge de 18 ans
qu'elle fera officiellement usage de son prénom de Rose, voire Rose Marie.
Sa mère est fileuse, ... fileuse et
journalière parce qu'à quelque 6 kms cheminant bois et prés, se trouvent les
manufactures textiles de Vimoutiers dans l'Orne. En cette première moitié du 19ème siècle,
la production moyenne est de 15.500 pièces l'an, et dans un rayon de
cinq lieues, la fabrication anime cinq mille métiers autour desquels
vingt mille ouvriers s’affairent. Le textile,
toiles de fils et cretonne, règne sur
toute la région.
Il faut aller et venir pour
s'approvisionner en fils et fournir. Vie aimante au foyer mais si dure au
labeur. Un jeune frère ne semble pas survivre, et Pierre Alexandre,
de 6 ans cadet de Rose, naît dans les champs alors même que sa mère s'en
vient de Vimoutiers. Rose et Pierre Alexandre seront fileurs avant
de devenir tisserands. Et Rose plus tard décrira ce temps-là : "En grandissant on
aidait à l'ouvrage, en apprenant à lire quelque peu; On était simple et
naïve au village : On respectait ses parents, craignait Dieu"
("Autrefois" Fleurs d'Automne)
Et voici donc ce qui par Rose à ses amis
en suite nous fut conté : "Rose est
tisserande à
Vimoutiers, lorsqu'elle apprend à
lire presque seule vers sa treizième année. Plus tard, une amie
complaisante lui donne des leçons d’écriture le soir".
Des années passent ... "Rose a trouvé un livre dans un
grenier. Il est vieux, froissé, déchiré... Elle a rassemblé les pages, a
recousu le dos, et dans un morceau de tablier bleu, lui a taillé une
reliure de toile. Ce livre est le
Télémaque. Rose, la déshéritée, a son
premier ami. Désormais, Télémaque guide la jeune tisserande à travers le
monde antique ... Et Rose se met à étudier, à l’âge de trente ans,
l’histoire, l’antiquité grecque et romaine, la littérature européenne,
la philosophie ..."
Devenue servante à Vimoutiers, puis à Pont
l'Evêque puis à Lisieux, Rose a pris l'habitude de traduire dans l'ombre
ses émotions en poésies. De cette petite servante, surprise un jour en "délit d'écriture", l'on se raille. Que lui
importe puisqu'elle y trouve le bonheur.
Et comme il est un Dieu pour les poètes,
Rose a fait la connaissance d'Adolphe
Bordes, membre de la Société des Gens de lettres et de l’Académie de
Caen, qui l’encourage dans ses essais. Il l'aide à rassembler
ses textes, les réunit dans un volume dont il écrit la préface et le
fait éditer au moyen d'une souscription publique. L'Alouette aux
Blés" paraît en 1863, puis en 1865.
Rose est alors au service de Louis de
Fougy, philosophe auteur de "Conseil
à mes enfants", avec lequel elle s'entretient avec
humilité et avidité intellectuelle. Ainsi, comme l'observe Louis de
Veyrières "tantôt la cuisine de
M. de Fougy est manquée, tantôt les Muses ont à se plaindre. Il y a
parfois trop de feu d'un côté et pas assez de l'autre."... ce qui fera
dire plus tard à propos de Rose dans un salon envieux : "Une
illettrée qui faisait des vers et brûlait ses sauces".
Par deux fois édité, "L'alouette aux blés"
est un vrai succès littéraire dont la
presse parle. Rose est "médaillée" et ses textes sont bientôt mis en musique et
même chantés dans les goguettes, tel "Le Bonheur au Village"
par Ch. Poisot publié dès 1866, "l'Enfant à sa
mère", romance, paroles de Rose Harel, musique de R.A. Grisy.
En 1867, le classique
Benjamin Godard compose une
trentaine de musiques pour des textes qui représenteront la chanson
française du 19ème siècle. Pas moins de 6 poèmes de Rose sont choisis.
Ils sont : Le printemps, Fleur de vallon, La marguerite, L'amour, Pauvre
bouton, La belle enfant.
Mais voici que bientôt la guerre gronde.
Rose s'attriste et s'en retourne quelques années à Bellou... "On ne
chante plus au hameau"...
©NJGJ@vimoutiers.net
.../...
Portrait page 1
- Portrait page 2
- Portrait page 3
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Visiter l'église de Bellou
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Marcher dans la forêt de Moutiers-Hubert
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Fabrication des toiles et cretonne à Vimoutiers
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Les illustrations du Télémaque
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Le Télémaque, manuscrit original
Bibliographie: "L'Alouette aux blés" et "Fleurs
d'automne". Registres paroissiaux et d'Etat civil. Recensements.
Monographie du sonnet par Louis de Veyrières. Rose Harel par Marie de Besneray, Raymond Basin,
Raoul Jacquemin, Alexandre Massé. Une promenade lexovienne par Christiane
Bouland et Claudine Quesnot. Bibliothèque électronique de Lisieux,
University of Toronto libraries, Gallica, Google books.
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